Étude comparée entre deux propositions de prise de son et de mixage

Analyse technique et esthétique comparée entre la proposition d'enregistrement de la classe et la proposition du compositeur.

Choisy-le-Roi 

    La création de la pièce à la Cathédrale de Choisy-le-Roi fut enregistrée par la classe de technique du son du conservatoire. Notre dispositif était le suivant : un couple AB, assez écarté et avec un léger angle, devant l’ensemble (avec deux microphones omnidirectionnels DPA 4006), ainsi que deux microphones cardioïdes à chaque extrémité du choeur (avec deux microphones Schoeps MK4). Nous avions également placé des appoints devant le premier violon (également pour le chant), les percussions et devant les vents. 

    Bien que le compositeur ait apprécié la « majestuosité de la salle » de notre proposition, les problèmes de mise en place de la part des musicien.nes lors de cette représentation étaient trop importants pour que cette version soit retenue in fine

    De mon point de vue, cet enregistrement propose une belle présence de l’électronique, parfois même envahissante, dans laquelle celle-ci est intelligible, tout en portant une certaine sensation d’espace. La voix de la poétesse est tout de même plus présente qu’en situation de concert, étant donné que le fichier audio a été ajouté au montage. 

    Cependant, le principal avantage de cette proposition est la mise en avant de la dimension spatiale : c’est le cas pour l’ensemble orchestral et l’électronique, peut-être un peu moins pour le chœur, qui lui manque d’homogénéité. 

    Le revers de cette belle sensation d’espace est que l’on manque d’intelligibilité parfois au niveau du chœur et de l’orchestre : la réverbération de l’église « floute » beaucoup les transitoires d’attaque, et le choix du dispositif mis en place ici rend bien compte de cette réverbération. 

    On retrouve également une belle image stéréo, ainsi qu'une bande passante assez large, notamment de belles basses fréquences. 

    Les interactions l’orchestre et l’électronique sont bien mises en valeur dans cet enregistrement. Le vrai problème de celui-ci est le chœur, et les problèmes qui relèvent purement de la musique (départs ratés). 


    Saint-Louis-en-l’Île

    En raison de ces problèmes musicaux cités précédemment, le compositeur a dû réaliser une deuxième prise de son lors du deuxième concert, à l’Église Saint-Louis-en-l’Île. Le dispositif mis en place était le suivant : un couple AB pour les cordes (celui-ci était proche de l’orchestre donc on entend principalement les cordes), un appoint au-dessus des percussions, des appoints pour la trompette, la clarinette et le basson, ainsi que pour le trombone. Pour le chœur, deux zooms furent positionnés à un angle de 90°. Un troisième zoom était placé au dos du chef, tourné vers le public (pour les chants participatifs et les instrumentistes qui se déplacent parfois). Ceux-ci étant placés assez bas, ils ont permis de récupérer les violoncelles et la contrebasse que l’on n'entendait pas suffisamment dans le couple AB. 

    Le plus gros enjeu du mixage de cette prise de son était l’homogénéisation du son direct et des sons traités. Le mixage des sons projetés par le totem furent un grand challenge, étant donné qu’il fallait restituer une installation multipoints avec une scénographie et un espace prenant beaucoup de place, en stéréophonie. Il s’agissait donc de faire des choix esthétiques, et ce dès la prise de son. 

        Le but de cet enregistrement était de créer une archive, une restitution à la fois pour réaliser une médiation, des dossiers, mais également afin de permettre aux musicien.nes de garder une trace de cette expérience. 

    Selon moi, cette proposition permet une bonne intelligibilité du discours musical. Celle-ci manque peut-être cependant quelque peu de sensation d’espace et d’ampleur pour l’orchestre.  

    La partie électronique, notamment la voix, est très avant dans le mix, mais cela rend compte de l’écriture musicale du compositeur. Les déplacements de l’électronique sont accentués et affirmés, l’écoute est beaucoup plus guidée dans cette version. Cette partie électronique prend beaucoup de place, en tout cas plus qu’en situation de concert, ce qui rend la partie orchestrale un peu plus discrète, comme s’il s’agissait d’un accompagnement de l’électronique. Il s’agit d’une prise de position esthétique et artistique pour une situation d’écoute hors concert. Quant au chœur, celui-ci est plus homogène que dans la version précédente. 

    La qualité globale de l’enregistrement est présente, et on retrouve bien tous les éléments de façon assez homogène et intelligible. Cette proposition est également vivante et non « aseptisée », ou trop statique. Celle-ci rend bien compte du discours musical du compositeur.


    Conclusion 

    Cette expérience de prise de son m’a appris une fois de plus que la dimension musicale passait toujours au-dessus des autres dimensions, dans une proposition de prise de son et de mixage. Ici, les problèmes musicaux qui ont eu lieu lors du premier enregistrement ont rendu celui-ci inutilisable, quel que soit le résultat technique. Aussi, les contraintes techniques ou logistiques nous amènent toujours à réaliser des choix esthétiques et artistiques dans l’exercice de prise de son et de mixage. C’est par ces choix que l’on réalise un enregistrement qui guide plus ou moins l’écoute du public. 


Extrait audio de la version de la classe d'acoustique musicale et techniques du son du conservatoire 

Extrait audio de la version de Jean-Yves Bernhard


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